Nine
Si vous ne souhaitez pas passer pour une indécrottable provinciale en goguette au ciné du coin, ne faites pas comme moi et prononcez bien Naïne et pas Nine à la française, comme moi. En fait, tout ça, c'est la faute à Claire Chazal qu'a pas été phénoménalalalalaaaale sur ce coup là.
Un jour où je zappais sur le 20h pour échapper au 23e épisode de Franklin, la tortue gémissante sur Tiji, la présentatrice vedette à la mise en plis impeccable façon Elnett nous présentait cette nouvelle comédie musicale signée Rob Marshall, le même qui avait déjà réalisé l'inoubliable Chicago.Dans son laïus et par trois fois, elle a clairement prononcé Nine, comme le prénom de la fille d'Inès de la Fressange.
Donc, comme je crois tout ce qu'on dit à la télé, surtout une sommité télévisuelle comme Claire Chazal, je suis allée m'enquérir des horaires de Nineu (avec un léger accent méridional pour faire genre, je suis du coin) au méga CGR. La Jennifer du comptoir m'a toisée de son oeil narquois triplement cerné d'eye-liner violet métallisé et m'a répondu : "ah, j'imagine que vous voulez aller voir Naïïïne, Madame?". J't'en foutrais du madame moi, j'ai encore une dent de sagesse qui pousse et c'est pas rare qu'on demande à ma fille si la jeune femme qui l'accompagne est sa grande sœur... Oui, ma fille a 5 ans et alors ?
Passé ce grand moment de solitude et envers et contre toutes les mauvaises critiques, j'ai finalement vu Nine juste avant qu'on ne le retire définitivement de l'affiche, soit au bout d'une semaine à peine alors qu'on a vu des Steven Seagal rester au moins trois semaines à l'affiche !
Avec une distribution exceptionnelle, on pouvait sans doute s'attendre à mieux mais j'avoue ne pas avoir été insensible à l'imperfection de Nine. Hommage à Fellini et à son Huit et demi, cette comédie musicale jouée à Broadway évoque la dolce vita et le cinéma italien oublié. Daniel Day Lewis dans le rôle du cinéaste dépressif en manque d'inspiration et au bout du rouleau (de pellicule hou hou hou, je crois bien que j'ai avalé Jean Roucas, moi) livre une prestation convaincante et chante largement aussi bien que Richard Gere dans Chicago ! Nicole Kidman n'est sans doute pas Anita Ekberg mais n'en reste pas moins lumineuse et touchante. Penelope Cruz est rien moins que super sexy, Marion Cotillard est plutôt juste même si l'une de ses chansons tire gravement en longueur et les numéros graves succèdent à des tableaux très hollywoodiens, ce qui donne un ensemble certes inégal mais rafraîchissant.
Et puis surtout, pourquoi tant de haine dans les critiques dithyrambiques lues ça et là dans la presse (...Les chorégraphies hésitent entre celles de la RAI berlusconienne et une fin de soirée chez Michou - Le Nouvel Obs... mélange d'obscénité et de pudibonderie qui réussit si bien à Hollywood depuis sa fondation - Le Monde, etc.).
Faut-il vraiment descendre en flammes un film tout en se réclamant d'un Fellinisme pur et dur ? N'y a t-il aucune place, aucun public (à part moi ?) pour des films qui ne relèvent sans doute pas du génie mais qui sont quand même hyper agréables à regarder ? Et la bêtise ne réside t-elle pas justement dans le fait d'espérer voir du Fellini quand on va voir un Rob Marshall ? Mais que de questions existentielles, mon Dieu !
Toujours est-il que l'élitisme me gave aussi largement que la médiocrité et bien qu'ayant adoré Huit et demi qui est, à mon sens, le meilleur film de Fellini, j'ai vraiment aimé Nine que je n'ai pas abordé comme une pâle copie de l'œuvre initiale.
Et pour en rajouter un peu dans le style middle class, filez aussi voir L'Arnacoeur qui reprend les codes d'une bonne comédie romantique US et qui fonctionne parfaitement grâce notamment au couple Duris/Paradis. C'est drôle, rafraîchissant, les seconds rôles sont épatants et les deux acteurs principaux (excessivement maigres tout de même) crèvent l'écran, non pas de leurs os saillants mais de complicité évidente. A ce propos, Romain, le mambo et accessoirement Dirty Dancing n'ont aucun secret pour moi donc la prochaine fois que tu veux t'essayer à reproduire une chorégraphie culte, tu m'appelles avant, tu seras gentil (et moi, je serai très, très contente).
je n'ai regardé que le déhanché, je suis professionnelle avant tout...
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